BANDE-ANNONCE 

Pendant le premier confinement de 2020, Rémi, un artiste polyvalent queer, rencontre à la gare Saint-Charles de Marseille un jeune ivoirien, Aboubakar, qui dormait à la rue. Le trouvant plutôt vif, intelligent et drôle, il lui propose de venir s'installer chez lui, un modeste studio de 18 m2 avec balcon. Rémi ne tarde pas à draguer le jeune homme de plus en plus ouvertement. Aboubakar va-t-il céder aux avances insistantes de cet homme dont la sexualité et le mode de vie sont en tous points différents des siens ?

During the first confinement of 2020, Rémi, a versatile queer artist, met a young Ivorian, Aboubakar, who was sleeping on the street at Saint-Charles station in Marseille. Finding him rather lively, intelligent and funny, he suggests that he move into his home, a modest 18 m2 studio with a balcony. Rémi doesn’t take long to flirt with the young man more and more openly. Will Aboubakar give in to the insistent advances of this man whose sexuality and way of life are in every way different from his?

LA VOD DU FILM EST DISPONIBLE ICI : https://videos.hdpinteractive.com/content/aboubakar-et-moi-chronique-d-un-confinement-

LE DVD DU FILM EST DISPONIBLE ICI : https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=video&no=4133

 

 Durée du film : 1H27

 

Avec Aboubakar Soumahoro, Rémi Lange, Harouna Diarra, Franck Lairot-Six, Thomas Polly, Ivan Mitifiot

Voix du narrateur Philippe Barassat 

Voix de la télé Tiburce

Doublure d'Aboubakar Zaankidine 

Scénario Rémi Lange, Aboubakar Soumahoro

Image, son Rémi Lange, Cédric Denonfoux 

Mixage Didier Blasco

 Étalonnage Rémi Lange, Tiburce

Direction artistique Philippe Barassat, Didier Blasco 

Musique originale Les Dupont

Réalisation, montage, production Rémi Lange

© Photos, bande-annonce et film Rémi Lange 2022

 


« Thriller sentimental » en huis clos captivant, où s’exprime un cocktail jouissif de désir, d’humour, d’authenticité et de suspense ! » FESTIVAL CHÉRIES-CHÉRIS 2022

« Jubilatoire et plein d’une finesse et d’une maîtrise qui séduit d’autant plus qu’elle n’a rien d’ostentatoire (...). Une interprétation à la Buster Keaton. Une suspension du sujet moral qui est le signe de la maturité et de la sagesse d’un vrai cinéaste. »
FRANÇOIS ZABALETA, CINÉASTE, DRAMATURGE, ÉCRIVAIN

« Simplicité de l'histoire et de son traitement.
Rémi montre une nouvelle fois son talent pour la fiction et pour la mise en scène. »
JOSEPH MORDER, CINÉASTE

« Magnifique. Les mains d’Aboubakar enlacent avec fébrilité les mains de Rémi comme le corps qu’il n’ose toucher. Et de cette gestuelle amicale naît le pacte secret d’un désir inavouable inachevé. »
ÉLISA POINT, ACTRICE MUSICALE

« C'est très original, très généreux aussi (...). Faut-il comparer son talent à celui de Rohmer ?
Une chose est sûre : Rémi sait manier une caméra. »
YVAN QUINTIN, ÉDITEUR (EROSONYX)

« Du désir, de l’humour, de la vérité et… du suspense ! Bravo. »
ALAIN BUROSSE, CINÉASTE, DIRECTEUR DES PROGRAMMES COURTS DE CANAL + DE 1984 À 2000

 NOTE D'INTENTION DE RÉMI LANGE

(attention : spoilers !)

    Comme pour beaucoup de mes films, l’aventure de « Aboubakar et moi (chronique d’un confinement) » a commencé non pas avec le désir de raconter une histoire, mais avec une rencontre. À la différence de mon film « Le chanteur », la rencontre ne fut pas organisée mais fortuite. Pendant le premier confinement de 2020, pour ne pas rester seul chez moi dans mon studio marseillais de 18m2 avec un balcon de 4m2, j’ai demandé à ma mère de me « prêter » sa chienne que j’adore, ce qui me permettait aussi de sortir et d’éviter la claustrophobie et l’angoisse de la solitude. À la gare de Marseille, qui était dans mon périmètre autorisé, j’ai rencontré un jeune ivoirien, Aboubakar Soumahoro, qui était assis sur un muret. Le premier soir, nous avons  discuté longuement. Je l’ai trouvé, comme on le dit dans le film, « vif, intelligent et   drôle ». Mais j’avais peur de faire venir quelqu’un que je connaissais mal, ce n’est donc que le deuxième soir que je lui ai proposé de venir dormir et de s’installer chez moi. Très vite, nous sommes devenus amis. Je peux même dire que je suis vite tombé amoureux de lui, son amour pour le cinéma ne faisant que sceller encore plus nos liens affectifs… Mais très vite il m’a dit qu’il aimait les femmes, et j’ai donc abandonné l’idée de construire une relation amoureuse avec lui. J’en suis resté à notre relation d’amitié. Il devait repartir en Italie, d’où il venait, en août 2020, mais finalement il est resté jusqu’au 15 octobre 2020… Nous nous entendions à merveille : on avait tous les deux une grosse envie de faire la fête après avoir subi de plein fouet, chacun seul, la crise de la Covid 19 et son confinement. Par ailleurs, on adorait regarder des films que je lui choisissais parmi ma collection personnelle constituée de milliers de films DVD et de fichiers vidéo dans des dizaines de disques durs.
        Un jour, peu de temps après son arrivée, il m’a raconté que, dans son pays, il aimait « faire le clown » dans la rue, attirer l’attention des passants en jouant des personnages qu’il s’inventait, en faisant son « one-man-show ». Je lui ai donc dit que s’il aimait jouer, on pourrait improviser un film de fiction devant ma caméra. Je le sentais capable de jouer d’une façon très naturaliste, car Aboubakar, en ayant vécu dans la rue, a l’habitude de parler aux inconnus; de plus il a une grande capacité d’adaptation et sait trouver les bons mots immédiatement, dans un français qu’il maîtrise très bien… Il a ce qu’on appelle la « tchatche » et donc la capacité d’improviser.
        N’ayant pas les moyens de faire un film très compliqué (peu d’argent, juste une petite caméra HD en guise de moyens techniques, un décor naturel : mon studio…), l’idée était d’utiliser ce que nous étions, de jouer nos propres rôles et de se servir également de ce que nous avions été obligés de subir : le confinement, l’enfermement. Cette idée d’un huit clos entre lui et moi le ravit, et nous commençâmes à tourner le 1er juin 2020. La première scène fut celle où lui roule un joint assis à côté de moi et où je lui demande ce qu’il a fait dans la journée et la signification de ce que lui appelle « tourner » : c’est-à-dire se promener pour essayer de glaner un peu d’argent, en aidant les gens, en leur parlant, en les charmant.
        Nous avons élaboré le film tous les deux. Personnellement, je ne voulais pas réaliser un faux compte-rendu journalier de ce que nous avions vécu ensemble, ce qui aurait été ennuyeux car nous aurions fait une sorte de film de famille où seuls les événements heureux sont enregistrés, ou un faux journal filmé constitué de moments ordinaires de notre vie quotidienne, une simple juxtaposition de morceaux sans grand intérêt, nombriliste, d’une vie de « couple » pendant un confinement. On a donc opté pour la forme d’un film de fiction, une sorte de « thriller sentimental » où le suspense règnerait. Il fallait donc raconter une histoire que nous n’avions pas vécue dans le cadre de notre confinement. Une histoire implique un conflit. Il est bien connu que les gens heureux n’ont pas d’histoire... Or Aboubakar et moi étions très heureux à vivre notre « petite vie pépère » : la journée lui allait chercher du travail ou voir sa copine, moi je restais chez moi à travailler derrière mon ordinateur, le soir on se retrouvait, on mangeait un bon petit plat puis on regardait un film, on s’enivrait au sens baudelairien du terme, avec un peu d’alcool, un peu de shit ou de tabac (mais sans sexe)… Il n’y a donc pas d’histoire sans obstacle. On a imaginé pendant un certain temps que l’obstacle viendrait de l’extérieur (une sorte de monde dystopique où les mesures macronistes deviendraient très autoritaires : plus le droit de sortir du tout, livraison de plateaux repas en bas de la porte de l’appartement par l’armée, etc.) mais cette idée était irréalisable faute de moyens financiers et humains : difficile de trouver des acteurs en temps de pandémie où la peur de rencontrer l’autre règne. Comme nous étions deux personnes enfermées (ou presque car on avait le droit de sortir un peu tout de même comme tout le monde) dans le même endroit, il fallait donc que l’obstacle vienne de l’intérieur…
        Deux solutions se présentaient : l’obstacle venait soit du jeune ivoirien soit de son hôte.
        Je ne voulais surtout pas que l’obstacle vienne du « migrant ». En janvier 2019 j’avais lu dans les médias un fait-divers sordide : « Drame à Joué-lès-Tours (Indre-et- Loire). Un homme de 56 ans a été retrouvé mort chez lui le 17 décembre dernier, criblé de 28 coups de couteau. Son bourreau serait le jeune migrant qu’il hébergeait depuis une semaine. » Ce meurtre avait fait les choux gras de la presse nauséabonde, celle d’extrême droite, dont www.valeursactuelles.com d’où est tiré cette citation. Ne désirant pas nourrir les amalgames du RN et des médias qui soutiennent ce parti, j’ai évacué de suite l’idée qu’Aboubakar pourrait jouer le rôle d’un criminel.
        Donc l’obstacle devait venir de son hôte… que j’allais incarner. Quel personnage problématique ce Rémi du film devait-il être ? Quel conflit allait-il créer ? C’était assez simple... Étant homosexuel, le Rémi du film devait atteindre un objectif bien précis : faire sortir le jeune migrant hétérosexuel de ses limites, des frontières de sa sexualité. Et le conflit devait venir du fait que le jeune ivoirien devait constamment repousser les avances de son hôte - qui devaient devenir de plus en plus lourdes - tout en étant obligé de rester enfermé avec lui sous peine de se mettre en danger s’il sortait (sortir signifiait risquer d’attraper le virus qu’on disait très virulent voire mortel)… Dans ce cas, l’obstacle est aussi vécu par le Rémi du film : le personnage qui est amoureux mais dont le sentiment n’est pas (ou pas encore) partagé. En incarnant un personnage de ce type, j’avais bien conscience que j’allais m’attirer les foudres des partisans acharnés de Metoo et de Black Lives Matter. Nous avions décidé que, dans notre histoire, il n’y aurait ni viol, ni abus sexuel ni agression physique (l’hôte blanc ne finit pas par attacher le jeune migrant pour le violer par exemple) pour ne pas transformer notre film en film d’horreur ! En revanche, les gestes de l’hôte blanc devaient devenir de plus en plus déplacés et ses paroles de plus en plus lourdes… Jouer ce « monstre » ne me dérangeait pas car il devait servir à alimenter le moteur du récit et à créer le suspense suivant : le jeune ivoirien va-t-il se sentir obligé de répondre aux exigences sexuelles de son hôte ? Mais ce « monstre » allait être un problème pour les partisans de Metoo pour qui « forcer c’est violer » et, même si le Rémi du film ne le force en rien, il le drague lourdement… Par ailleurs, les partisans de Black Lives Matter pouvaient critiquer le film juste parce qu’un blanc réalise un film sur un noir, alors réaliser un film où un personnage blanc semble abuser de l’état de détresse d’un noir…
        Même si nous étions conscients de cette polémique future, nous avons quand même opté pour la deuxième solution…
        L’obstacle viendrait donc de l’hôte blanc et, après tout, ce n’est qu’un rôle qu’on s’invente pour créer un conflit dans le cadre d’un récit cinématographique, pas un état de fait : je ne suis pas le personnage manipulateur du film, de la même manière que Bruno Ganz, l'acteur qui incarne Hitler dans « La Chute», n’est pas Hitler ! Et John Wayne n’a jamais tué les « vilains indiens » ! Malgré tout, même si le film allait être classé, avant même d’avoir circulé, au rang des films « bannis » ou « déboulonnés » qu’on ne doit « plus voir » et surtout ne « plus faire aujourd’hui » (les films de Gainsbourg comme « Je t’aime moi non plus » ou « Stan the flasher », les films de Bertrand Blier, « Beau-père », « Préparez vos mouchoirs », entre autres, etc.), on a décidé d’improviser nos scènes dans ce sens.
        Pour Aboubakar et moi, le Rémi du film n’est pas un « monstre », une caricature du vieil homme blanc qui abuse d’un jeune noir en état de faiblesse. C’est un homme qui éprouve une solitude extrême mais qui est aussi très attentionné : il soutient de tout son cœur Aboubakar dans son combat contre le patronat esclavagiste. Dans son état d’amour désespéré, il se montre tendre et très humain, même s’il se montre souvent lourd dans sa manière de draguer et trop insistant.
        Aboubakar et moi voulions profiter aussi de ce cadre fictif pour montrer, à l’intérieur d’une scène brièvement écrite, les liens forts d’amitié et de partage que peuvent vivre deux personnes totalement opposées tant au niveau de leur sexualité qu’au niveau de leur origine socioculturelle (l’un est jeune, l’autre vieux; l’un est hétéro l’autre homo; l’un est croyant l’autre athée;  l’un a un travail, de l’argent, un studio, l’autre est très pauvre et n’a presque rien)…
        Par ailleurs, Aboubakar ne devait pas être une simple victime. Comme le Rémi du film, c’est un personnage multiple, ambigu. Aboubakar se montre de plus en plus proche de Rémi, physiquement parlant… Et tend ainsi la perche à son « agresseur ». Nous avons prêté une grande attention, avant et pendant chaque prise de vue, aux mouvements des mains d’Aboubakar, à ses gestes, nous avons essayé de soigner dans la mise en scène le rapport tactile qu’il entretient avec Rémi. Au début, il refuse tout contact physique puis, petit à petit, il met la main sur le genou de Rémi alors qu’il vient de refuser que celui-ci lui fasse la même chose à son égard (des gestes qu’il trouvait fort peu virils !), puis il prend la main de Rémi quand leurs liens d’amitié deviennent de plus en plus forts et finit même par embrasser son hôte dans le cou en dansant tendrement avec lui… Bref, Aboubakar et moi voulions que nos personnages nous ressemblent : qu’ils soient tout sauf monolithiques...
        Nous n’avons fait qu’une seule prise par plan. Un autre personnage s’est invité dans l’histoire, à notre grande surprise : l’oiseau qu’on voit dans le film ! Les images de cet animal ont été prises sur le vif, en mode documentaire, et la voix hors-champ de Rémi quand il lui parle a été ajoutée au montage. Le tournage s’est terminé le 15 octobre 2020, le jour du vrai départ d’Aboubakar en Italie. Nous avons joué cette scène deux heures avant l’horaire de départ de son train, l’émotion ressentie au moment de la prise de vue est donc loin d’être simulée ou artificielle... Le seul petit mensonge de cette scène est le fait que j’ai dit à Aboubakar que je ne voulais pas l’accompagner à la gare. Je ne désirais pas qu’on voit le Rémi du film accompagner son invité à la gare, les scènes d’adieu sur les quais de gare étant pour moi trop convenues et trop banales au cinéma. Aboubakar a pensé réellement que je n’allais pas l’accompagner. Moi je mentais mais sa déception est bien réelle ! En réalité, je l’ai bel et bien accompagné à la gare et nous avons même pris le temps de visionner notre dernière prise de vue ensemble avant de nous quitter définitivement. À ce jour, je n’ai toujours pas revu Aboubakar, mais nous ne nous sommes jamais perdus de vue, et il a bel et bien vu notre film qui se termine par sa vraie réaction, récupérée de WhatsApp. Un moment très important pour le vrai réalisateur qui écrit ces mots car ils prouvent qu’Aboubakar aime vraiment le film et qu’il me soutient dans toutes les démarches que je peux accomplir pour le faire vivre ! Quoi qu’il en soit, je n’aurais pas diffusé le film sans son accord... La fin du film en « caméra cachée » ou plutôt « téléphone caché » (il ne savait pas que j’allais enregistrer ses messages pour les inclure dans la bande-son) est l’aboutissement de ma démarche en tant que réalisateur : atteindre un pur moment de vérité… même si souvent j’aime jouer de la porosité entre la réalité et la fiction !

 

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